Mon histoire (suite)

-René Dubray-

 

 

A notre premier terme au CONGO, nous n'avions pas de voiture. Nos enfants, trop jeunes, ne nous permettaient pas de grands déplace­ments. Nous avions acheté un vélo de dames et nous déplacions ainsi. Le dimanche, il y avait deux offices, ce qui permettait à chacun d'accomplir ses devoirs dominicaux en se rendant à la chapelle à vélo. Un résident, rentrant définitivement en Bel­gique, nous proposa de racheter sa voiture. Il s'agissait d'une petite voiture D.K.W., deux por­tes, ce qui nous semblait intéressant pour la sé­curité de nos enfants. Le marché fut conclu et, à notre retour de Belgique, nous avions un véhicule. Pour être plus autonome, il fallait que mon épouse puisse conduire. Je m'appliquai à être son moni­teur, ce qui n'était pas évident. " II paraît que c'est très difficile pour un mari, d'apprendre à son épouse à conduire ". Des " Je n'y arriverai jamais " furent surmontés par beaucoup d'encouragement et d'amour. L'examen théorique fut facile devant   l'A.T. (Administrateur.Territorial). A l'examen prati­que, mon épouse, toute rayonnante, s'en tira très bien ! Elle avait son permis de conduire " INTER­NATIONAL ".

Elle pouvait maintenant se rendre à l'hôpi­tal, à l'économat, ou, quand je l'accompagnais, faire de petites escapades le dimanche, dans les villages indigènes voisins de la Base. Nous décidons d'aller rendre visite à des amis colons à LUSUKU. Cette localité se trouve sur l'autre rive de la rivière LUBILASH1QUI qui marque la limite entre les provinces du KASAI et du KATANGA. J'ai fabriqué un porte-bagages à fixer sur le toit de la voiture, nous pouvons ainsi emporter un peu plus que la contenance du coffre qui est assez réduite.

C'est un voyage de 253 km, ce qui, en Afrique, avec trois jeunes enfants, représente une expédition. C'est la saison sèche, nous sommes à l'abri du " POTOPOTO " (boue glissante) sur les routes mais nous avons l'inconvénient de la pous­sière (route en terre) et de la TOLE ONDULEE désagréable pour les vibrations qu'elle provoque et qu'il faut aborder à une vitesse supérieure à 60 km/heure au risque d'une fatigue ressentie dans les avant-bras au volant. Notre voiture a deux por­tes s'ouvrant vers l'arrière. Les vibrations provo­quées par l'état de la route, décrochent le premier cran de verrouillage des portières et celles-ci ne sont plus en sécurité que par le deuxième cran et risquent de s'ouvrir violemment sur l'arrière. Il m'arrive dans ce cas, en roulant et en maintenant bien la poignée, de remettre en sécurité la portière côté passager.

 La route est longue, nous mettrons plus de 10 heures pour parcourir les 253 km. La lassi­tude du voyage engendre des chamailleries entre les deux garçons. Finalement, nous décidons avec mon épouse, de les séparer. Je prendrai sur le siège avant ËTIENNE, le plus turbulent des deux. Le calme est revenu et la route semble moins ra­boteuse. Soudain, j'aperçois un banc de sable (genre CONGERE) qui barre la route, mais qui a déjà été franchi par d'autres véhicules, marqué par le passage des roues. Je remarque aussi, précé­dant ce banc de sable, une zone de forte " Tôle ondulée ". La portière du côté de l'enfant, sous l'ef­fet des vibrations, se met en insécurité. C'est alors que notre fils, prompt à la manœuvre, imitant mon geste pour reclaquer la portière et vu la légèreté de son corps, sera emporté par l'ouverture bru­tale de la porte et disparaîtra, entraîné sous la portière. Je ne peux m'arrêter immédiatement, l'ar­rière de la route disparaît dans un nuage de pous­sière. Je crains le pire. Je stoppe la voiture et me précipite dans l'épais brouillard poussiéreux. Je ne perçois aucun cri. Dans quel état vais-je dé­couvrir notre garçon ? Finalement, je le découvre, hébété, au milieu du banc de sable. Ses lunettes ne sont pas cassées et il a une légère éraflure au menton. C'est le seul banc de sable que nous rencontrerons durant le voyage…..


 

                                                                               Sur la route de LUSUKU.

Petite pose peu avant la chute d'Etienne.

A gauche, Etienne qui boit son gobelet ; assise au milieu,

Geneviève ; mon épouse et à droite Guy.

 

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